Publication de la circulaire du 6 septembre 2023 relative à la gestion de la retraite progressive des fonctionnaires de l’État et des magistrats et à l’organisation des relations entre le Service des retraites de l’État et les employeurs partenaires.
La retraite progressive est désormais ouverte aux fonctionnaires de l’Etat, les agents non titulaires relevant du régime général de sécurité sociale étant déjà éligibles au dispositif.
La présente circulaire précise les modalités de dépôt des demandes de retraite progressive par les agents, d’instruction et de gestion des demandes par le Service des retraites de l’État (SRE) en lien avec les employeurs.
1. Rappel du dispositif juridique
La retraite progressive concerne la fin de carrière. Pour en bénéficier, l’agent doit remplir des conditions d’âge, de durée d’assurance et d’exercice exclusif à temps partiel auprès d’un employeur de la fonction publique de l’État.
La condition de temps partiel n’est pas opposable aux fonctionnaires occupant un emploi à temps incomplet.
1.1. La condition d’âge (art. D 37-1)
L’agent doit avoir atteint un âge « plancher » égal à son âge d’ouverture des droits (AOD) diminué de deux années, soit 62 ans, à l’issue de la montée en charge de la réforme.
Compte tenu du relèvement progressif de cet âge à compter du 1er septembre 2023, cet âge « plancher » sera progressivement relevé d’un trimestre par génération, suivant la même trajectoire que l’âge d’ouverture des droits des fonctionnaires sédentaires. La retraite progressive est ainsi ouverte selon la montée en charge suivante :
De fait, les générations nées jusqu’au 31 décembre 1962 inclus remplissent la condition d’âge dès l’entrée en vigueur du dispositif au 1er septembre 2023.
Cette condition d’âge pour accéder à la retraite progressive concerne l’ensemble des agents, sans adaptation selon qu’ils soient sédentaires, actifs ou super-actifs. S’agissant de ces deux dernières catégories de fonctionnaires, ils doivent donc avoir atteint les mêmes conditions d’âge que les sédentaires, c’est-à-dire l’AOD de droit commun -2 ans de leur génération et non leur âge anticipé ou minoré de départ -2 ans.
Ainsi un fonctionnaire actif ou super-actif, ou tout autre fonctionnaire qui serait éligible à un départ anticipé (pour handicap etc…) qui choisirait de partir de façon anticipée à la retraite avant l’atteinte de l’âge plancher ne peut prétendre au bénéfice de la retraite progressive puisqu’il a déjà fait valoir ses droits à retraite.
En revanche, une fois cet âge plancher atteint, la retraite progressive est possible, quel que soit, ensuite, le motif de départ en retraite définitive de l’assuré : parent de 3 enfants, parent d’enfant infirme, fonctionnaire handicapé, départ anticipé pour carrière longue.
Aucun âge maximal ne fait obstacle à l’entrée ou à la poursuite de la retraite progressive. Un agent régulièrement maintenu dans les cadres au-delà de l’âge à compter duquel il peut liquider sa pension ou de sa limite d’âge pourra solliciter le bénéfice de la retraite progressive s’il remplit les conditions.
1.2. La condition de durée d’assurance : (art. D 37-1)
La condition de durée d’assurance tous régimes pour accéder à la retraite progressive est fixée à 150 trimestres.
1.3. La condition de temps partiel : (art. D 37-1)
Le bénéfice de la retraite progressive nécessite d’exercer une activité à temps partiel mentionnée à l’article L. 612-1 du code général de la fonction publique, à la date à compter de laquelle la pension partielle est due. Par conséquent, le temps partiel thérapeutique défini aux articles L. 823-1 du code général de la fonction publique n’ouvre pas droit à la retraite progressive.
La quotité travaillée est comprise entre 50 et 90 %, selon le dispositif de temps partiel de droit commun dans la fonction publique de l’État (temps partiel de droit ou sur autorisation).
S’il n’est pas déjà à temps partiel, le fonctionnaire ou le magistrat doit adresser sa demande de temps partiel à son employeur. L’employeur n’est pas tenu d’accorder le temps partiel demandé par l’agent au motif que celui-ci remplit les conditions d’âge et de durée d’assurance pour bénéficier de la retraite progressive : il conserve son pouvoir d’appréciation en matière d’autorisation du temps partiel compte tenu des nécessités de service. Il rend sa décision dans les conditions de droit commun qui régissent les rapports entre l’administration et ses agents : le silence conservé pendant deux mois vaut rejet de la demande. Partant, le fonctionnaire ou le magistrat est incité, dans le cas où il ne serait pas déjà à temps partiel, à demander à son employeur cette autorisation concomitamment à sa demande de retraite progressive auprès du SRE, soit 6 mois avant la date d’effet souhaitée.
2. Modalités de dépôt, d’instruction de la demande de retraite progressive et de paiement de la retraite progressive : (art. D 37-2 et D. 37-3)
Le dispositif de retraite progressive entre en vigueur le 1er septembre 2023. Toutefois, le décret d’application de l’article 26 de la LFRSS prévoit en son article 6 que la demande de l’agent pourra être présentée dès le lendemain de la publication du décret.
Afin d’organiser au mieux le processus de traitement, d’instruction et de liquidation, et de maîtriser les délais dans l’intérêt des agents, le processus de gestion des demandes de retraite progressive décrit ci-dessous est mis en place.
Les conditions d’éligibilité (âge et durée d’assurance) peuvent être vérifiées au préalable sur le site info-retraite.fr.
2.1. Dépôt de la demande
Pour faciliter le traitement de sa demande, le fonctionnaire ou le magistrat adresse sa demande de retraite progressive de préférence via son compte ENSAP (https://ensap.gouv.fr/).
Dans sa demande, l’agent doit préciser la date d’effet souhaitée de sa retraite progressive compte tenu de la date à laquelle il remplit les conditions. Cette date d’effet souhaitée ne peut être antérieure à la date d’enregistrement de sa demande.
Toutefois, les agents ayant déposé leur demande avant le 31 décembre 2023, pourront solliciter le bénéfice d’une date d’effet de la retraite progressive à compter du 1er septembre 2023, sous réserve que les conditions d’âge et de durée d’assurance et de bénéfice de temps partiel soient remplies (art. 6 du décret).
Au-delà du 31 décembre 2023, dès lors que les conditions sont remplies et que l’agent bénéficie d’un temps partiel à cette date, c’est la date de réception de la demande ou de présentation de la demande dans l’ENSAP5 qui déterminera la date d’effet de la retraite progressive. Dans le cas d’une date d’effet souhaitée postérieure à la demande, ce sera cette date.
Si l’agent bénéficie déjà d’un temps partiel, il l’indique dans sa demande.
2.2. Délai d’instruction
La mise en œuvre de la retraite progressive est un dispositif similaire à celui de la liquidation de la pension de retraite, et nécessite la consolidation du compte individuel de retraite (CIR) de l’agent. C’est la raison pour laquelle le délai d’instruction par le SRE est fixé à 6 mois. Aussi, l’agent qui souhaite bénéficier de ce dispositif à une date précise doit anticiper suffisamment sa demande en tenant compte de ce délai d’instruction.
L’autorisation de travail à temps partiel doit être transmise par l’employeur au SRE au moins quatre mois (120 jours) avant la date d’effet souhaitée.
S’agissant des personnels enseignants, des personnels d’éducation et de documentation des écoles et des établissements d’enseignement, ainsi que pour des personnels d’orientation en service dans les centres d’information et d’orientation, pour lesquels l’autorisation d’assurer un service à temps partiel n’est donnée que pour une période correspondant à une année scolaire et qui doivent présenter leur demande de temps partiel au plus tard le 31 mars précédent le début de l’année scolaire, l’autorisation de travail à temps partiel doit être transmise par l’employeur au SRE de l’État au moins trois mois (90 jours) avant la date d’effet souhaitée.
Une fois son dossier instruit, l’agent recevra un décompte de pension partielle lui indiquant les éléments pris en compte pour le calcul et le montant qui lui sera versé.
La pension partielle est concédée et notifiée un mois (30 jours) avant la date d’effet souhaitée.
2.3. Mise en paiement de la retraite progressive
La concession de la retraite progressive donne lieu à l’émission d’un titre de pension partielle, notifié à l’agent via l’ENSAP.
Le montant de la pension partielle servie équivaut au montant de pension calculé conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables à la date d’effet, affecté d’un coefficient égal à la quotité non travaillée.
Le paiement intervient dans les conditions de l’article D. 37-1 CPCMR : la pension partielle est due à compter du premier jour du mois suivant la date à laquelle les conditions sont réunies (âge, durée d’assurance et autorisation de temps partiel) à moins que ces conditions ne soient réunies le premier jour du mois, sans que la date d’effet souhaitée puisse être antérieure à la date de la demande (hors période transitoire visée au point 2.1). La pension partielle est payée mensuellement et à terme échu (fin du mois).
Durant la période transitoire de mise en œuvre de la retraite progressive, les premières pensions partielles ne seront payées qu’à compter du mois d’avril 2024, avec un versement des arrérages dus à compter de la date d’effet de la pension partielle.
2.4. Modalités de calcul de la pension partielle due au titre de la retraite progressive
Le montant de la pension partielle est calculé sur la fraction du temps partiel non travaillée. Pour un temps partiel à 50 %, le fonctionnaire se verra servir une pension partielle égale à 50 % du montant de pension auquel il aurait droit s’il partait à la retraite définitive à cette date (soit une demi-pension en plus de sa rémunération). Pour un temps partiel à 80 %, le fonctionnaire se verra servir une pension partielle égale à 20 % de la pension à laquelle il aurait droit à la date d’effet de sa pension partielle.
Cette pension est liquidée en fonction de l’indice de référence ou du traitement pris en compte dans le droit commun de la liquidation de pensions, y compris pour les agents en détachement.
Pour les agents en position de détachement, l’indice de liquidation retenu est déterminé de la même manière que pour la liquidation de la pension classique.
La pension partielle est calculée avec tous ses accessoires proratisés (MPE, IMT, NBI, CTI etc.) dès lors que les conditions pour en bénéficier sont satisfaites. De même, s’agissant de l’ITR, celle-ci sera calculée et versée avec la pension partielle dans les conditions applicables au moment de la liquidation de celle-ci.
S’agissant de l’allocation temporaire d’invalidité (ATI), cette dernière continuera d’être versée pendant la période de retraite progressive dans les conditions applicables aux fonctionnaires non radiés des cadres.
2.5. Modalités d’évolution de la retraite progressive
Tout changement de quotité travaillée devra être communiqué sans délai par l’employeur au SRE. Les informations transitant par le flux mensuel devront être confirmées sans délai par la mise à jour du compte CIR et la transmission de l’arrêté modificatif de temps partiel.
L’évolution du coefficient travaillé prend effet le premier jour du mois suivant la date d’évolution de la quotité de travail, sauf si celle-ci évolue le premier jour du mois où dans ce cas, l’évolution du coefficient prend effet ce jour.
Lors de l’évolution de la quotité non travaillée, seul ce coefficient de taux évoluera pour le calcul de la pension partielle.
Cette évolution ne donnera pas lieu à une nouvelle liquidation de la pension partielle. Aussi, les services et accessoires nouveaux ne seront pas pris en compte dans la retraite progressive. L’évolution du taux ne donnera pas lieu à l’émission d’un nouveau titre de pension. L’évolution du montant de retraite progressive sera toutefois inscrite dans les bulletins de pension.
En cas de retard dans la transmission des informations de quotité travaillée, la régularisation des montants de la pension partielle interviendra ultérieurement. En raison de la lourdeur de ces régularisations, il est vivement recommandé aux employeurs d’anticiper l’information du SRE de ces changements.
Les fonctionnaires en congés de maladie (congé de maladie ordinaire, congé de longue maladie, congé de longue durée) sont maintenus en temps partiel pour la durée restante telle qu’elle résulte de l’autorisation d’exercice à temps partiel, conformément à la jurisprudence du juge administratif8. La pension partielle est par conséquent maintenue durant cette période, y compris lorsque le niveau de prise en charge du fonctionnaire diminue.
A l’issue de la durée initiale ou renouvelée de l’autorisation, le fonctionnaire devra solliciter une nouvelle autorisation, à défaut de quoi il serait, en dépit de son congé de maladie, réputé reprendre à temps plein sur un emploi à temps complet et perdrait par conséquent le bénéfice de la retraite progressive.
2.6. Suspension de la retraite progressive
L’absence de renouvellement, la suppression, la suspension, la modification de l’autorisation de travail à temps partiel sont signalées sans délai par l’employeur du fonctionnaire au SRE. Le CIR devra également être complété sans délai (l’employeur ayant toujours accès au CIR de son agent).
La retraite progressive peut être suspendue tant que l’agent ne justifie plus remplir les conditions nécessaires (période de formation au cours de laquelle l’agent exerce à temps plein, etc.).
La suspension prend effet le premier jour du mois suivant celui où les conditions ne sont plus remplies sauf si celle-ci intervient le premier jour du mois, où dans ce cas, la suspension prend effet ce jour.
2.7. Fin de la retraite progressive
Le dispositif n’est mobilisable qu’une seule fois : le retour au temps plein ou la liquidation de la pension complète mettent fin définitivement au bénéfice du dispositif.
Le service de la pension partielle prend donc fin à titre définitif lorsque la pension complète prend effet. Dans ce cas, la fin définitive de la pension partielle prend effet à compter de la prise d’effet de la pension complète, ou lorsque le fonctionnaire reprend une activité à temps plein sur un emploi à temps complet. Dans cette dernière hypothèse, la perte définitive de la pension partielle prend effet le premier jour du mois suivant, sauf si ce motif prend effet le premier jour du mois où, dans ce cas, la perte définitive prend effet ce jour.
La pension complète est alors liquidée dans les conditions et selon les modalités de calcul applicables à sa date d’effet (art. D 37-3). Elle prend en compte, dans la durée des services et bonifications mentionnée à l’article L. 13 et la durée d’assurance mentionnée à l’article L. 14, les services accomplis pendant la période de retraite progressive, augmentés, le cas échéant, des bonifications de durée des services ou des majorations de durée d’assurance.
2.8. Coordination inter régimes
La modification du taux de quotité travaillée devant avoir un « effet immédiat » (au mois suivant) dans tous les régimes de retraite, le GIP Union-Retraite doit proposer des modalités de partage de l’information entre les régimes.
En application de l’article R. 161-19-8 du code de la sécurité sociale, auquel renvoie le nouvel article D. 37-1 du CPCMR, le dernier régime d’affiliation, qualifié de « régime instructeur », est chargé d’instruire la demande unique de retraite progressive (réception de la demande, contrôle de sa recevabilité, fixation de la date d’effet et du pourcentage de sa fraction de pension). Le dernier régime d’affiliation est celui de l’activité exclusive. Pour les fonctionnaires de l’État, ce sera nécessairement le SRE du fait de l’exclusivité des fonctions.
Le « régime instructeur » de la demande de retraite progressive doit communiquer aux autres régimes de retraite les informations utiles pour le service de la retraite progressive par ces derniers. Il doit ainsi communiquer le taux de retraite progressive applicable par les autres régimes de retraite. Pour les poly-affiliés/pensionnés, le taux de retraite progressive doit être identique dans tous les régimes. Aussi, le SRE pourrait être amené à liquider une retraite progressive (inverse) du taux de quotité travaillée de 40 %, qui n’existe pas dans la fonction publique de l’Etat. De même, le régime général pourrait être amené à liquider une retraite progressive tenant compte d’une quotité travaillée de 90 % d’un salarié ayant des trimestres à liquider dans la fonction publique de l’État.
Le « régime instructeur » détermine les pièces nécessaires à l’instruction de la demande de retraite progressive.
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